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Droit au compte et détention de compte bancaire

I. La détention d’un compte bancaire

A. Le droit au compte

Un compte pour chacun. – Toute personne physique, fût-elle interdite bancaire, justifiant d’un domicile en France a droit à l’ouverture d’un compte bancaire, auprès de l’établissement de crédit de son choix (art. L. 312-1 C. mon. et fin.).

Pour ce faire, la personne devra fournir au banquier une déclaration sur l’honneur attestant qu’elle ne dispose d’aucun compte en France. En cas de refus de la part de l’établissement de crédit, il reviendra à la Banque de France de choisir un établissement quelconque, en tenant compte de la proximité par rapport à la personne qui en fait la demande, du choix qu’elle a effectué et aussi des parts de marché de l’établissement de crédit visé. Lorsqu’il s’agit d’une personne physique, les textes imposent à l’établissement de crédit qui a refusé l’ouverture du compte de cette possibilité de saisine de la Banque de France, et le cas échéant, imposent à l’établissement de crédit de transmettre la demande et les informations requises à la Banque de France.

Afin d’assurer le respect du principe du droit au compte, l’Association française des établissements de crédit et des entreprises d’investissement a mis en place une charte d’accessibilité bancaire. Cette charte est homologuée par le Ministre de l’Économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières. Son respect par les établissements de crédit est assuré par le biais d’un contrôle opéré par l’ACPR.

L’établissement de crédit choisi peut limiter les services octroyés, dans le respect du décret relatifs aux services bancaires de base.

De même, la clôture dudit compte à l’initiative de l’établissement de crédit désigné ne pourra intervenir qu’après une notification motivée adressée à la Banque de France. À cet effet, le titulaire du compte dispose d’un délai minimum de deux mois.

Un compte individuel. – Toute personne, même mariée a droit à l’ouverture d’un compte individuel. Le conjoint ou partenaire en PACS n’a aucun droit de regard ni sur l’ouverture dudit compte, ni sur son fonctionnement, et a fortiori sur sa clôture. Le titulaire du compte doit être majeur. L’ouverture d’un compte bancaire par un mineur nécessite l’accord de son représentant légal. Une personne peut posséder plusieurs comptes à la fois, fonctionnant sous sa seul signature.

L’indépendance des comptes. – Les comptes ainsi ouverts sont indépendants les uns des autres, ce qui exclut le fait que le banquier puisse effectuer délibérément des transferts de fonds entre lesdits comptes. Toutefois, ce principe est assorti d’exceptions : sous réserve d’un mandat spécial émanant du titulaire du compte, le banquier peut effectuer des transferts de fonds d’un compte chèque vers un compte d’épargne. L’opération inverse est également admise, mais sous réserve d’un mandat spécial spécifique.

B. Un compte, plusieurs titulaires

Un compte pour plusieurs. – Il s’agit des hypothèses de dérogation par rapport au principe du caractère individuel des comptes. Elles se démarquent de l’hypothèse de procuration.

La procuration. – C’est l’hypothèse dans laquelle le titulaire du compte donne l’autorisation à une tierce personne pour faire fonctionner son compte.

La procuration peut concerner un ou plusieurs comptes du mandant-titulaire du compte. Elle peut également concerner plusieurs mandataires, pour un seul et même compte. Il n’est pas nécessaire qu’un lien de parenté existe entre le mandant et le mandataire.

La procuration suppose le remplissage et la signature d’un imprimé ad hoc, délivré par la banque. La procuration peut être unique, limitée dans le temps ou dans son montant. Elle peut être révoquée à tout moment. Dans tous les cas, elle prend fin avec le décès du titulaire du compte. La banque aura par conséquent la responsabilité de vérifier – à chaque opération – que la procuration reste valable et que la signature est bien celle du mandataire.

Le compte collectif ou compte joint. – C’est l’hypothèse de deux ou plusieurs personnes titulaires d’un même compte. Cette hypothèse n’est possible que pour les comptes de chèques et les comptes de titres.

Ce peut être un compte indivis ou un compte fonctionnant à signatures séparées. Lorsqu’il est stipulé que le compte fonctionne sur la signature conjointe, les signatures de toutes les personnes concernées seront requises pour chaque opération. Par contre, lorsqu’il est stipulé que le compte fonctionne sur signatures séparées, la signature d’un seul titulaire est requise pour chaque opération. Par opération, il convient d’entendre le virement, l’émission de chèque, le retrait et le dépôt d’argent, l’autorisation de prélèvement…

La solidarité des titulaires du compte-joint. – La convention collective régissant le compte-joint prévoit la solidarité active et passive des titulaires du compte. Par solidarité active il faut entendre la faculté pour chaque titulaire de disposer de la totalité des fonds, même si concrètement il n’en est pas le déposant. La solidarité passive concerne le fait que tous les titulaires du comptes peuvent être poursuivis en paiement de la totalité des dettes occasionnées par le fonctionnement du compte, sans que ceux-ci ne puissent invoquer le bénéfice de division ou invoquer le fait qu’il n’en sont pas à l’origine.

Toutefois, les titulaires du compte peuvent déroger à ce principe en désignant un responsable du compte, à son ouverture. La conséquence est qu’en cas d’émission de chèque sans provision la personne désignée subira l’interdiction bancaire sur le compte concerné et sur ses comptes personnels. Les autres titulaires ne seront frappés d’interdiction que pour le compte-joint.

II. Les obligations du banquier à l’égard du titulaire du compte

A. L’obligation d’information

L’assurance de l’obligation d’information par le banquier suppose l’établissement à l’ouverture d’une convention de compte de dépôt (1). Cette convention devra par ailleurs contenir les conditions de sa résiliation (2). Le prestataire devra également opérer des vérifications sur la personne du client (3).

  1. L’établissement d’une convention de compte de dépôt

Les établissements de crédit devront informer leurs clients et le public sur les conditions générales et tarifaires applicables aux opérations relatives à la gestion d’un compte de dépôt. Cette information devra s’opérer selon des modalités fixées par un arrêté du Ministre de l’Économie.

Lorsque le titulaire du compte est une personne physique n’agissant pas à des fins professionnelles les termes et conditions relatives à la gestion de son compte devront faire l’objet d’une convention de compte de dépôt. À cet effet, il fut imposé aux établissements de crédit et à La Banque Postale de proposer au moins une fois par an, à leurs clients n’ayant pas de convention de compte de dépôt, la signature dudit document, ce jusqu’au 31 décembre 2009.

De manière générale, à l’égard du client le prestataire est redevable d’une obligation d’information, de conseil, et de mise en garde. Alors que l’obligation d’information consiste en la fourniture objective d’éléments se rapportant aux caractéristiques du service fourni, l’obligation de conseil consiste dans la discussion sur l’opportunité dudit service. Quant à l’obligation de mise en garde elle consiste pour le prestataire à attirer l’attention du client sur les risques qu’il encourt. Cette dernière obligation a été développée par la jurisprudence depuis les années 1990, depuis un arrêt fondateur du 5 novembre 1991 dit arrêt Buon. Cette opération est d’autant plus importante que le plus souvent les opérations effectuées sont des opérations spéculatives et les clients sont des personnes profanes, non averties.

Le contenu de la convention de compte de dépôt. – Elle contient essentiellement des conditions générales et tarifaires, les conditions de résiliation du compte… L’objectif est d’assurer l’information correcte du client sur la portée de son engagement. Pour ce faire, avant même l’ouverture du compte, ces conditions devront faire l’objet d’une information préalable du client. Pour ce faire, l’établissement de crédit devra se servir d’un support papier ou de tout autre support durable. Il est admis que l’établissement de crédit puisse s’acquitter de cette obligation en fournissant au client un projet de convention de compte de dépôt.

Par ailleurs, à tout moment de la relation contractuelle le client peut demander que la convention de compte lui soit communiquée, sur support papier. L’établissement de crédit ne devra pas refuser d’accéder à cette demande.

La modification. – Tout projet de modification de la convention de compte de dépôt devra être communiqué au client dans un délai de deux mois avant l’application de la modification envisagée. Cette communication s’opère par le biais d’un support papier ou autre support durable. Le document de communication devra préciser qu’à défaut de notifier son refus dans ce délai le client est censé avoir accepté. Il devra également notifier au client la possibilité de résilier sa convention, sans frais, avant la date d’entrée en vigueur indiquée.

  1. La résiliation de la convention de compte (art. L. 321-1-1, III C. mon. fin.)

La résiliation sur initiative du client. – Le client a la faculté de résilier la convention de compte de dépôt, sous réserve du respect d’un délai de préavis. Ce délai ne peut être inférieur à un mois.

Au-delà de douze mois cette résiliation peut être effectuée sans frais. Dans les autres cas, elle peut donner lieu à de frais de résiliation calculés proportionnellement aux coûts induits par la résiliation.

La résiliation sur initiative de l’établissement de crédit. – Lorsque la résiliation est opérée sur initiative de l’établissement de crédit, celui-ci devra respecter un délai de préavis qui ne peut être inférieur à deux mois. Dans ce cas, les frais pratiqués seront calculés au prorata de la durée d’existence de la convention avant sa résiliation. Dans le cas où ils sont versés à l’avance par le client, celui-ci devra en recevoir la rétrocession partielle des frais, calculés au prorata.

Il est prévu une possibilité d’aménagement de la résiliation, avec l’accord du client, lorsque celui-ci fait l’objet d’une mesure de surendettement.

  1. Les vérifications

L’identité et l’adresse du client. – Préalablement à l’ouverture d’un compte, le prestataire devra opérer des vérifications, notamment sur l’identité et l’adresse de son client ou client potentiel. À cet effet, les vérifications porteront sur la pièce d’identité s’il s’agit d’une personne physique, sur l’extrait K bis si le client est une société commerciale ou un groupement d’intérêt économique, ou la justification de la déclaration à la préfecture s’il s’agit d’une association.

En ce qui concerne l’adresse, sa vérification s’opère généralement par l’envoi d’un courrier au domicile du client, ou par un rendez-vous improvisé dans les locaux.

Auparavant, ces vérifications avaient pour but d’éviter la création sous identité d’emprunt. Elles participaient donc d’une politique de gestion de risques. Mais, ces obligations ont été accrues avec l’émergence de nouveaux textes sur la lutte contre le blanchiment des capitaux, et le terrorisme.

La capacité et le pouvoir. – Les vérifications porteront également sur la capacité et le pouvoir du client ou client potentiel. En ce sens, les règles du Code civil sur le régime des capacités et des pouvoirs trouveront à s’appliquer.

Le secret bancaire. – Il découle du secret professionnel. Il a été consacré dans le domaine bancaire par l’article 57 de la loi du 24 janvier 1984. Toutefois, son efficacité est affaiblie par les atténuations et les dérogations dont il est assorti. Ainsi est-il admis que le banquier ne soit plus tenu au respect du secret bancaire lorsqu’une information sur son client devient publique.

Ce principe connaît également des dérogations, notamment dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux. En outre, de manière générale, le secret bancaire ne saurait être opposé aux autorités judiciaires, policières, et douanières lorsqu’elles mènent leurs investigations.

La non-ingérence du banquier. – Le principe de la non-ingérence suppose que le client soit seul à décider des opérations qu’il effectue sur ses comptes. À cet effet, le prestataire ne pourrait s’y substituer et y prendre des décisions. Toutefois, subsistent à la charge du prestataire les obligations d’information, de conseil, et souvent de mise en garde. À cet effet, il y a lieu de souligner que depuis l’arrêt Buon de 1991, la jurisprudence a développé une obligation particulière de mise en garde à la charge du banquier. Le prestataire peut ainsi voir sa responsabilité engagée lorsqu’il s’abstient de mettre en garde un client se livrant à des opérations spéculatives, ou tout simplement lorsqu’il est établi que le client n’est pas un opérateur averti.

Les incidents de paiement. – D’autres vérifications peuvent être également opérées, notamment sur les informations tenues auprès de la Banque de France, sur les antécédents du client. Ces vérifications portent notamment sur les incidents de paiement éventuels, notamment sur une inscription éventuelle du client sur un fichier tenu par la Banque de France.

La déclaration de soupçon. – Divers textes ont été élaborés, dans le cadre de la lutte contre la grande criminalité. C’est le cas notamment de la loi du 12 juillet 1990 sur la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant des stupéfiants, de la loi du 29 janvier 1993, ainsi que celle du 13 mai 1996. Dans certains cas, le prestataire devra effectuer des déclarations de soupçon auprès de TRACFIN (Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits Financiers clandestins).

C. La garantie des déposants

Généralités. – Tous les établissements de crédit agréés en France doivent adhérer à un fonds de garantie de dépôts, ayant la qualité d’une personne morale de droit privé. Ce fonds a pour objet d’indemniser les déposants en cas d’indisponibilité de leurs dépôts ou autres fonds remboursables. À cet effet, il reçoit des cotisations versées par les établissements de crédit et les organismes qui leur sont affiliés. Ces derniers devront s’y soumettre, sous peine de sanctions et de pénalités de retard.

Les conditions d’adhésion des établissements de crédit, le plafond d’indemnisation par déposant, les modalités et délais d’indemnisation ainsi que les règles relatives à l’information de la clientèle, font l’objet d’arrêtés du Ministre en charge de l’Économie.

Il convient de s’intéresser au principe même de l’intervention du fonds de garantie (1), et aux effets que cette intervention induit (2).

  1. L’intervention du fonds de garantie

L’intervention a priori. – Sur proposition de l’ACP, le fonds de garantie peut intervenir, à titre préventif, auprès d’un établissement de crédit dont la situation augure à terme une indisponibilité des dépôts ou autres fonds remboursables. Dans ce cas, le fonds définit les conditions de cette intervention, après avis de l’ACP. L’ACP peut subordonner son intervention à la cession totale ou partielle de l’établissement de crédit ou à l’extinction de son activité, notamment par la cession de son fonds de commerce.

Les sommes ainsi versées bénéficieront du privilège de l’article L. 611-11 du code de commerce. En outre, sauf dans les cas limitativement énumérés à l’article L. 650-1 du même code de commerce, le fonds ne peut être tenu responsable des préjudices subis du fait des concours qu’il a ainsi consentis.

L’intervention a posteriori. – Le fonds de garantie est mis en oeuvre sur demande de l’ACP dès que celle-ci constate que l’un des établissements de crédit n’est plus en mesure de restituer – immédiatement ou à terme rapproché – les fonds qu’il a reçus du public, conformément aux conditions législatives, réglementaires ou contractuelles applicables à leur restitution. Il convient de noter que l’intervention du fonds de garantie a pour conséquence la radiation de l’établissement concerné de la liste des établissements de crédit agréés.

  1. Les effets de l’intervention du fonds de garantie

Le fonds de garantie est subrogé dans les droits de l’établissement de crédit pour le compte duquel il est intervenu. Il a la faculté d’engager la responsabilité des dirigeants de droit ou de fait de l’établissement, afin d’obtenir le remboursement des sommes versées. Pour ce faire, il devra informer l’ACPR.

Arnaud Kwasigan AGBA

Docteur en droit, Master Secteur financier

Avocat à la Cour

Chargé de cours en Master Secteur financier (Banque – Assurance – Finance)

Université Toulouse 1 Capitole

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